Crossed #1 – comics – Milady Graphics

Il n’y a pas d’espoir. Pas de héros.
Personne ne viendra vous sauver.
Vous êtes seul.

Point final serais-je tenté de dire, tant Crossed ne fait pas dans la dentelle. Là où The Walking Dead ausculte, intelligemment et avec brio, la psyché du survivant, on a ici tout l’autre pendant de la fin du monde : la bestialité absolue de sociopathes contaminés, enragés et pervers, face à la froide survivance nihiliste de quelques êtres humains. Après tout, si c’est la fin du monde, on a pas de raison de bouquiner tranquillement chez soi et d’être épargné par l’horreur de la chose. « Pour Lecteurs Avertis » précise très justement la quatrième de couverture. Vous ne pourrez pas dire que vous n’étiez pas prévenus.

J’aime les survivals, j’aime les slashers, j’aime les films d’horreur. J’aime les films subtils et sincères tout comme je peux aimer les variations cyniques et bourrines. J’aime le fait que des BD puissent en être le pendant décomplexé. Et c’est exactement ce qu’est Crossed : une BD d’horreur pour amateurs du genre. Parfois dégueulasse, souvent outrancière et trash (si avec ça je n’ai pas donné envie à votre « part sombre »…), Garth Ennis (Punisher, Preacher, The Boys) propose l’un de ses boulots/brûlots les plus frontals, sans l’habituelle distanciation humoristique. Bon, y’a toujours quelques traits d’humour noir propre à l’auteur mais le récit est beaucoup plus clinique qu’habituellement.

Si vous êtes un habitué des productions Avatar (No Hero, Black Summer, Wolfskin, tous trois publiés chez Milady justement), ce n’est visuellement qu’un cran supplémentaire dans la boucherie. Par contre, c’est dans le soupçon de perversité, de « sans pitié » absolu que vous pourrez trouver qu’il pousse le bouchon un peu loin alors que, paradoxalement, c’est aussi ce qui donne son identité (sa légitimité ?) au comics. Alors oui, tant de violence, c’est sûrement un peu facile voire même superficiel – suivant les limites de chacun – mais comme il le fait bien, flattant le caca qui est dans tout un chacun, et que cette virulence malsaine est cohérente avec le propos, l’ensemble peut être apprécié sans pour autant crier au loup.

Si j’avais un vrai bémol à mettre sur l’intrigue, ce serait au niveau de la narration dont on ne comprend qu’elle est éclatée dans le temps que tardivement. Il m’a fallu lire le dialogue d’un personnage mort précédemment pour comprendre ce fait, au détour d’une case, comme si de rien n’était. J’ai même immédiatement été faire des recherches sur le net pour savoir s’il ne s’agissait pas d’une erreur d’impression ou de façonnage (avec un cahier qui aurait été inversé) et ce n’est pas le cas. C’est donc loin d’être évident parce que ça n’apporte rien au regard de ces cinq premiers épisodes. Cette alternance n’ajoute aucun mystère supplémentaire, ne met pas en valeur d’éventuelles différences. Si Ennis voulait montrer d’un côté les personnages dans l’innocence de leur début et dans l’inhumanité de leurs actes quelques temps plus tard, c’est peu mis en valeur par une caractérisation un peu trop rapide et superficielle pour ce premier tome.

Pourquoi je critique cette BD qui n’est ni un chef d’œuvre, ni une purge ? Parce que j’apprécie que Milady propose ce genre de comics pour public avertis, que je souhaite que ça continu le plus longtemps possible et que j’adore le rendu du livre (un « soft-cover » solide et classieux, qui se range joliment dans la bibliothèque). On aime ou on aime pas mais ça décrasse au papier de verre par là où ça passe.


3 commentaires

  1. merci pour ce billet je vais y jeter un oeil si je le vois à la fnac/virgin

  2. Hey merci à toi aussi (je me suis tapé les trois cents et quelques pages de ton blog dimanche après-midi après être tombé dessus en cherchant des infos sur l’art-book Sucker Punch… ça m’a juste pris quelques heures).

  3. Je me retrouve complètement dans cette chronique… Je suis entrain de lire CROSSED… Et mon avis est mitigé. J’aime bien l’idée (un peu genre Walking Dead ) et le dessin est sympa mais je le trouve aussi super figé, rajoutez à ça le fait que le rythme est un peu bizarre dès fois on a même l’impression qu’il manque quelques planches pour rendre le truc compréhensible (ou on reviens en arrière car perdu dans le temps)… C’est comme si Jacen Burrows avait fait c’est illus en ayant que les prémisses du scénar de Garth Ennis (que j’adore) et qu’il avait la flegme de retravailler par la suite l’ensemble pour la cohérence… J’en suis à plus de la moitié et j’ai même du mal à la finir. Dommage.

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